vendredi 9 août 2013

Quatorzième étape : Cabrerets - Pasturat

Le 22/05

La nuit a été quelque peu réparatrice pour moi et même mes affaires ont eu le temps de sécher. Ce matin, la météo est un peu meilleure, je repars donc du bon pied.




Le temps de tout remettre dans le sac, je quitte Cabrerets aux alentours de huit heures. Je profite de la hauteur de la première falaise pour faire une photo du village. Comme tous les villages de cette vallée, il est très beau, mais comme le dit Michel Corringe, la route m’entraîne toujours. 

La route m´appelle et m´attire
A l´est, à l´ouest, au sud au nord.
Ce soir ici, j´ai trouvé un lit,
Demain je coucherai dehors.
Beaucoup de routes ramènent vers vous.
Mais la route m´entraîne toujours.
Et j´ajoute des lieues et des lieues
Aux lieues qui me séparent de vous.

{Refrain:}
Oh, bien sûr, j´ai souvent faim et froid
J´ai envie de m´arrêter parfois
Mais ma route m´entraîne toujours
Désir de concrétiser un symbole
De posséder l´unique beauté
Que l´on nomme liberté.


La liberté est là.


 Après sept kilomètres, j'arrive à Bouziès. 

C'est là que se trouve le chemin de halage le long du Lot qui passe par Saint-Cirq-Lapopie. Ma belle-mère m'a tellement dit que je devais aller voir ce village que, et comme je ne suis qu'à quatre kilomètres, je m’en voudrais de ne pas faire le détour.
Pour ne pas me charger pour rien, et puisque je dois quand même repasser par ici, je demande à un habitant de Bouziès de pouvoir déposer mon sac chez lui.
La chose faite, je démarre ma balade pour Saint Cirq.




La balade est très agréable, je ne regrette pas le détour.

Dernière grimpette pour arriver au village et je découvre depuis le fort, le décor de la vallée du Lot.







Mais le temps me manque pour rester plus longtemps, il me faut retourner à Bouziès.
Sur le chemin de retour, je retrouve Jef qui me demande si je suis en touriste ?!
Si tu veux, mais je voulais être plus léger pour venir ici, je vais récupérer mon sac à Bouziès et continuer vers Pasturat, où je resterai dormir.
Lui a l'intention de rester dormir à Saint Cirq. Son idée est très bonne, avec du recul, c'est ce que j'aurais aussi dû faire. On ne peut pas tout savoir.




Je reprends mon sac et continue directement mon chemin. J'ai l'intention de manger un bout lorsque je serai sorti du village.
En traversant celui-ci, je suis arrêté par un jardinier qui me demande si je vais vers Pasturat ? Je lui réponds que c'est ma destination du jour ! Il me dit alors que lorsque je serai à plus ou moins trois kilomètres du village, il y aura un petit chemin sur la droite qui est signalé comme cul-de-sac. Il me conseille de passer par là, cela me fera gagner quelques kilomètres et aussi éviter la route. C'est ce que je ferai.





 Il n'est que treize heures, je m'arrête pour manger près de ces animaux, question de ne pas être seul !! Après le repas, je m'offrirai même le luxe de faire une petite sieste. Pourquoi pas ! 
Comme prévu, je vois le chemin sur ma droite, jusqu'à une voie ferrée désaffectée, mais le garde-barrière lui est toujours là !
Les conseils de mon jardinier furent judicieux car la balade est très belle.










 A dix-sept heures trente, j'arrive à Pasturat. Après la visite de l'église, je vais directement au gîte d'étape où je retrouve Dominique et sa femme, que j'avais déjà rencontrés sur le chemin, mais cela ne date pas d'hier !! Le plaisir est d'autant plus grand.
La soirée est sympa, nous sommes une bonne vingtaine autour de la grande table et Dominique qui n'a pas son pareil pour se souvenir des prénoms de tout le monde, s'amuse à faire faire l’exercice aux autres convives.

Le 23/05

Le lendemain, ce ne sera plus la fête pour moi. J'ai très mal à la jambe et pour me convaincre de prendre la bonne résolution, il repleut. Cela m'achève et je décide d'arrêter là. La femme du gîte travaille à Cahors et me propose de partir avec elle en voiture. 
Elle me déposera chez  un autre Serge qui lui, tient le gîte d'étape " Le relais des Jacobins"
Je serai accueilli comme seuls les gîtes sur les chemins de Compostelle peuvent le faire.
C'est là aussi que je retrouverai Paul et Jane. Cela faisait aussi très longtemps que nous nous étions pas rencontrés. Paul heureux de me voir, me demande comment je vais ? Et là je fonds en larme et je lui dis que pour moi, c'est fini. Ma tendinite fait des siennes.
Parmi les autres pèlerins, il y a justement un docteur qui regarde ma jambe et qui me confirme que c'est terminé pour moi. Qu'il ne me reste qu'une chose à faire, c'est prendre du repos et de rentrer à la maison car il me sera plus possible de faire des longs treks avant cinq mois.
Je suis abasourdi. Lorsque le toubib aura repris la route, Serge viendra chez moi en me disant qu'il y a la médecine mais aussi son expérience sur le chemin. Il me confirme que dans les cinq prochains jours, il faudra rester pour me reposer, mais qu'il ne faudra peut-être pas attendre cinq mois avant de repartir. Qu'avec de la pommade et un peu de kiné, le mal pourrait rapidement disparaître, mais qu'il ne peut garantir de rien.
Après une brève réflexion, je décide de rentrer chez mon ami Christian à Angers. Pascale (ma petite femme) doit quand même passer par là dans une semaine, avant de se retrouver à trois pour descendre visiter le Périgord comme il était prévu avant mon départ pour le Puy.
Ma décision étant prise, Serge me conduira à la gare de Cahors pour y acheter mon ticket pour Angers. L'heure du départ du train n'étant qu'à quatorze heures, nous rentrerons au gîte où j'attendrai calmement l'heure du départ.
C'est comme cela que prendra fin mon pèlerinage à Compostelle. J'aurai plus de huit jours pour me remettre sur pied avant de redescendre dans le Périgord.
Mais cela fera l'objet d'autres pages sur le blog.
Sur mon Créanciale, Serge a écrit au-dessus de son cachet "A bientôt", car sur la route des chemins, on n’abandonne pas, on arrête et on reprend plus tard. A coup sûr, c'est ce que je ferai.

Treizième étape : Espagnac Sainte Eulalie - Cabrerets

Le 21/05

Dès le réveil, c'est déjà la douche froide, il pleut si fort qu'il n'est même pas utile de sortir de son lit pour avoir les informations sur le temps qu'il fait. Autant vous dire que dans ces conditions, il n'est pas facile de se lever. Ce sont d'ailleurs les filles, que rien n'arrête, qui montreront encore une fois l'exemple !!!!
Ce n'est que lorsqu'elles reviendront de la douche que je suivrai leurs traces. Quand à Jef, qu'il pleuve ou qu'il fasse soleil, ce n'est jamais avant huit heures trente qu'il décide de se lever.
C'est l'heure à laquelle je me décide de profiter d'une petite accalmie météo pour aller faire quelques photos du village.





Les photos terminées, je reprends seul, afin de rester dans mon rythme, le chemin vers Compostelle. Vu les informations qui me sont données à la sortie du village, je ne suis pas encore à destination !!


De toutes façons, loin ou pas et vu mes problèmes à la jambe, cela m'étonnerait fort que je puisse continuer encore très longtemps vers Compostelle. Ce n'est pas mon moral qui en a pris un coup, mais c'est l'évidence même. J'ai beau me soigner, rien ne change. Lorsque nous étions à la fête du fromage à Rocamadour, il y avait là une tente de la Croix-Rouge. J'en ai donc profité pour aller montrer ma jambe et on m'avait déjà dit qu'il fallait surtout du repos pour soigner une tendinite et que les anti-inflammatoires n'étaient pas la solution.


Dès la sortie d'Espagnac, le GR 651 rejoint les hauteurs des falaises et là un petit chemin les longe jusqu'à Saint Sulpice. La vue là-haut est vraiment extraordinaire, il ne manque que le soleil pour rendre ce parcours vraiment grandiose.


Passé la porte fortifiée donnant accès au château des anglais de Brengues ....


....... c'est la descente qui me conduit à Saint Sulpice. Là je fais la rencontre de divers petits personnages qui ont été déposés sur le bord du chemin par un artiste afin de signaler son atelier au village. C'est tellement sympa que je m'amuse à les photographier un à un.







Hélas lorsque j'arrive à Saint Sulpice, je ne trouve aucune trace de l'atelier de l'artiste. Comme il fait un temps à ne pas mettre un chat dehors, juste de pauvres pèlerins, je n'ai vu bien évidemment personne pour me renseigner.






 Je quitte Saint Sulpice pour Marcilhac. Le temps de faire les sept kilomètres qui séparent les deux villages, la pluie se remet a tomber. Si je ne veux pas que mon appareil photo prenne l'eau, je suis bien obligé de le ranger et de me protéger aussi sous ma cape. 

Lorsque j'arrive à Marcilhac, c'est le déluge.
Le village avec son église abbatiale et les restes d'une abbaye bénédictine avec sa salle capitulaire donnent un ensemble tellement harmonieux que je ne résiste pas à ressortir mon appareil de sa house. 



Il fait tellement mauvais que même en pleine saison touristique, tout est fermé et je fais une photo de l'intérieur de l'église depuis la grille cadenassée.

Encore une petite dernière photo de la place et je vois arriver deux ombres. Elles appartiennent aux deux canadiennes qui semblent arriver de nulle part.


On aimerait bien pouvoir se réchauffer un peu devant une tasse de café, mais où aller lorsqu'on se trouve dans un village qui semble mort !!
Il nous reste encore plus de vingt kilomètres avant d'arriver à Cabrerets, qu'il nous faut absolument faire une halte pour un peu de réconfort. C'est comme cela que nous allons frapper à la porte d'un restaurant. Il est, comme le reste du village fermé, mais nous n'avons pas d'autres choix que de tenter le coup. Toc toc, une femme vient ouvrir. Nous avons l'air tellement malheureux que la femme compatissante nous laisse rentrer et nous apporte trois cafés fortifiants. 
Après avoir remerciés notre bienfaitrice, nous reprenons notre chemin qui est toujours sous la pluie. Petite photo du pont et je reprends seul la route car il impossible pour moi de suivre le rythme des deux filles. 


Dans ces conditions atmosphériques, je me demande bien comment je vais pouvoir encore faire les derniers vingt kilomètres. Je suis trempé jusqu'aux os et mon sac n'est pas en meilleure posture. Je décide de ne plus suivre le GR qui remonte au sommet des falaises, mais de rester sur la route en espérant qu'une voiture passe pour faire du stop. Les kilomètres passent, puis j'entends le bruit d'un moteur. A l'approche du véhicule, je fais un signe de la main et la voiture s'arrête à ma hauteur. Le chauffeur ne va que jusqu'à Sauliac, qui n'est qu'à cinq kilomètres. Je ne peux laisser passer l’aubaine et je monte à bord. Trop sale temps en ce moment sur la planète !! 

Il ne faut que quelques minutes pour arriver à Sauliac, mais c'est déjà ça. Me revoilà sous la douche. Il n'y a pas assez de voitures sur cette route pour me permettre d'attendre un hypothétique passage. La marche s'impose donc. Après une demi-heure, nouveau bruit de moteur et à nouveau un petit signe pour faire comprendre que j'en ai marre de patauger dans l'eau. Une nouvelle fois, le voiture s'arrête. Cette fois, c'est une femme qui a vraiment pitié de moi car elle me dit directement que jamais, elle ne prend quelqu'un en stop. C'est donc mon jour de chance !! La brave dame va à Cabrerets et me propose de me déposer directement au gîte du Barry. J'accepte avec soulagement.
Cette journée plus que difficile est enfin terminée pour moi.

Au gîte, avant de prendre cette fois une vrai douche, je déballe toutes mes affaires pour les faire sécher dans la chambre où je mets bien évidemment le chauffage à fond. 
La scène est tellement cocasse, que j'aurais dû penser à en faire une photo.
Après une bonne douche bien chaude, je vais faire quelques achats afin de me préparer de quoi manger ce soir.
Je téléphone à Jef pour savoir où il en est dans sa progression. Il est toujours sur la route, il vient seulement de quitter Marcilhac. Je lui dit que je suis à Cabrerets et que j'ai fait du stop pour y arriver. Il me répond qu'il va faire de même et qu'il arrive.
Dans la soirée, il me téléphonera pour me dire qu'il s'est arrêté à Geniès car aucune voiture ne s'est arrêtée pour le prendre. 
Ce soir, je mangerai donc seul.